Editorial Voie Etroite N°194
Février-Mars 2003
Et si nous parlions tramways ?
C'est devenu un lieu commun de parler du renouveau des tramways en France et pourtant, force est de constater que nous assistons depuis vingt ans à un phénomène que nul ne pouvait imaginer dans les années 50. A cette époque les villes qui en possédaient supprimaient leurs réseaux ferrés au profit des autobus et des voitures individuelles qui, nous l'assurait-on, allaient être la panacée pour résoudre tous les problèmes de déplacements ; on sait ce qu'il en est résulté ! Seules trois agglomérations, Marseille, Saint-Etienne et Lille, avaient préservé ce qui subsistait de leur réseau d'origine mais leur avenir était loin d'être assuré.
Et puis, vingt ans plus tard, des responsables politiques et économiques, constatant que nos voisins européens, pas plus sous-développés que nous, avaient su préserver, moderniser et développer leurs réseaux de tramways pour le plus grand bien de tous, pensèrent que l'on pouvait aider les villes désireuses de tenter l'aventure tramway. Ainsi, le 5 mars 1975, le secrétaire d'Etat aux Transports, Marcel Cavaillé, adressa une circulaire en ce sens aux maires de huit grandes villes qui, bien souvent avaient sacrifié leurs réseaux quelques décennies plus tôt. Après des hésitations et une certaine frilosité quelques maires, bravant le lobby automobile, montrèrent quelque intérêt. Mais, curieusement, Nantes fut la première ville à répondre positivement alors qu'elle n'avait pas été sollicitée par la circulaire Cavaillé ! C'est donc en cette ville que le tramway fit sa réapparition en 1985 ; Nantes confirmait ainsi sa vocation de ville pionnière tout comme elle l'avait été au 19e siècle en étant la première à se doter, en 1879, d'un réseau à traction mécanique équipé de motrices à air comprimé.
En moins de 20 ans une dizaine de lignes et de réseaux ont vu le jour y compris dans l'agglomération parisienne ; en même temps, était entreprise la restructuration des villes dont le centre était rendu aux piétons tandis que la réorganisation des lignes de bus donnait une véritable cohérence à l'ensemble du réseau. Partout le résultat fut le même : toutes les prévisions de fréquentation furent dépassées dès la première année ce qui entraîna le prolongement des lignes initiales, la construction de lignes nouvelles, l'achat de nouveau matériel et l'augmentation de la capacité des rames par l'ajout d'une caisse intermédiaire. Actuellement d'autres réseaux sont en construction ou en projet et, avant la fin de la décennie, une vingtaine de villes auront retrouvé ce moyen de transport urbain non polluant, rapide et fiable qui, par ailleurs, dans certaines villes, utilisera des voies de la SNCF constituant le système tram-train très prometteur si l'on en juge par l'application qui en est faite en Allemagne par exemple.
Voie Etroite vous tient régulièrement informés de l'évolution de ce mode de transport urbain et, parmi nos lecteurs, bon nombre vibrent à la vue de rails à gorge noyés dans la chaussée ou de rames glissant entre les immeubles et sur les places ! Aussi, avons-nous pensé qu'il pouvait être intéressant de faire périodiquement le tour d'un réseau ou d'une ligne sous la forme d'une fiche présentant quelques photos et précisant l'histoire, l'état actuel, l'utilisation pratique du tramway dans sa ville, l'un étant un excellent moyen de découvrir l'autre.
Jacques Lefèvre