Editorial Voie Etroite N°293
Août - Septembre 2019
Il leur en faut toujours plus...
Tous les chemins de fer touristiques (ou presque), qu’ils soient gérés par des professionnels ou des bénévoles, sont confrontés à l’évolution du comportement de leur clientèle. L’avènement du 21e siècle et la banalisation des nouvelles technologies de la communication employées par la génération montante (celle qui a inventé la réalité virtuelle) tendraient à nous faire croire que tout est possible ; il n’y a qu’à demander ! Ainsi, alors que dans les années 70-80 nos voyageurs (nos clients, donc) se contentaient d’une balade en train, si possible à vapeur, pour revivre les moyens de transport d’antan connu avec ou par leurs parents, il leur en faut plus aujourd’hui.
Une balade à bord d’un train touristique (sur rails !), fusse-t-il historique, est devenu d’une telle banalité dans le monde d’aujourd’hui que nos voyageurs souhaitent pour la plupart “vivre une expérience” qui grâce aux cheminots n’aurait rien de virtuel. Que pouvons-nous leur offrir ? Une visite guidée ? Certains le font déjà, soit grâce à la sonorisation embarquée (et là nous sommes obligés de reconnaitre que le concept a été mis en place par les trains touristiques routiers), soit grâce à un guide qui vous accompagne. Cette prestation a été mise en place par le C.F. de la baie de Somme et semble plaire ; c’est souvent le chef de train qui officie dans une voiture dédiée, offrant le côté convivial et permettant un échange question-réponse apprécié. Les journées à thème, citons en vrac Halloween, Noël, les œufs de Pâques… Sont aussi un prétexte pour offrir autre chose qu’une banale promenade en train et attirer le client en famille ; sur certains réseaux les idées ne manquent pas mais nécessitent une préparation gourmande en main d’œuvre.
Quant aux musées (ferroviaires bien sûr) les clients d’aujourd’hui se contentent difficilement d’un alignement de véhicules, même classés Monument Historique, dont il faut lire le descriptif, il leur faut “des images qui bougent” avec à minima un commentaire qu’on peut écouter via son smartphone. Car le paradoxal de l’époque où on ne communique plus que par SMS dans sa vie quotidienne, c’est qu’on rechigne à lire soit même mais accepte volontiers de payer un guide pour qu’il nous raconte ce qui est écrit !
Il leur en faut toujours plus : Nous devons nous adapter, mais en empruntant nos trains historiques à vapeur ils ont déjà le mouvement, les odeurs, la fumée dans le prix de base ; tout ce que le cinéma a dû inventer dans les salles 4DX accessibles avec supplément ! Lui aussi doit s’adapter…
Alain Blondin